dimanche 12 février 2012

Les sophismes : la saveur de la vérité, la couleur de la vérité...

Mais ce n'est pas la vérité !

Un sophisme est un raisonnement d’apparence logique, mais dont les prémisses ne justifient pas correctement la conclusion. Exemple : les oiseaux volent dans le ciel, les avions volent dans le ciel, donc les avions sont des oiseaux. Les sophismes figurent parmi les techniques de propagande souvent employées pour convaincre ou désinformer. En voici quelques-uns que vous rencontrerez probablement souvent : 



  • Sophismes de causalité
Post hoc ergo propter hoc 
(latin pour « après ce fait, donc en raison de ce fait »)

Ce sophisme consiste à attribuer une relation de cause à effet (X a causé Y) au simple fait que X a précédé Y dans le temps. On y fait face chaque fois que quelqu’un prétend ou implique qu’un événement qui a lieu avant un autre événement l’a forcément causé. 

Exemple : Les études prouvent que 83 pour cent des personnes mortes dans des accidents d’automobile l’an dernier avaient consommé de la crème glacée le mois précédent. Un chiffre qui suggère fortement que la crème glacée cause des accidents d’automobile.

Troisième facteur

C’est une variation du sophisme précédent, où l’on affirme que X est la cause d’Y, alors que X et Y ont été tous deux provoqués par un troisième facteur, Z. Le fait d’omettre un troisième facteur permet souvent d’invoquer des chiffres statistiques impressionnants à l’appui d’une causalité pourtant inexistante. 


Exemple : Chaque année, quand le goudron de la chaussée commence à fondre, les gens meurent de coups de chaleur. Il semble donc que les émanations de goudron causent des coups de chaleur. (En fait, le goudron qui fond et les coups de chaleur sont dus tous les deux… à la chaleur. ) 

  • Sophismes dont les prémisses impliquent la conclusion
Pétition de principe


Parmi tous les sophismes qui impliquent que la conclusion à laquelle on veut en venir est exacte a priori, les pétitions de principe sont les plus courantes. Elles commencent souvent par « Tout le monde sait que… » ou « Il est universellement reconnu que… » Faites attention cependant : ce type de phrase peut aussi introduire un fait exact. Tous les Américains adultes savent (ou devraient savoir) que Washington est la capitale des Etats-Unis, et ce n’est pas une erreur de raisonnement d’accepter automatiquement ce fait comme certain. Ne figurent parmi les pétitions de principe que les faits non encore prouvés qui sont présentés comme vrais. 

Exemple : « C’est une vérité universellement reconnue que les célibataires jouissant de bons revenus ne peuvent qu’être à la recherche d’une épouse. » (Jane Austen était parfaitement consciente de l’ironie de cette déclaration, tirée de son roman Pride and Prejudice.) 

Question complexe

Ce type de sophisme demande une réponse unique à deux questions sans rapport ou n’ayant qu’un très lointain rapport l’une avec l’autre. 


Exemple : (Un politicien aux électeurs) « Voulez-vous élire mon adversaire et prendre le risque de voir notre système de sécurité sociale et de santé faire faillite dans les cinq ans ? » 


  • Sophismes qui déplacent le sujet
Ad hominem

(« Ad hominem » signifie en latin « contre l’homme »)

Il est normal et logique de s’interroger sur le bien-fondé des arguments d’une personne qui s’appuie sur sa seule autorité pour les justifier. On ne parle cependant de sophismes « ad hominem » que quand de tels arguments ou points de vue sont rejetés sous prétexte de fautes morales qui n’ont rien à voir avec la question. 

Exemple : Comment peut-on croire à la théorie de l’évolution alors que tout le monde sait que Darwin trompait sa femme ? 

Argument d’autorité

Il consiste à présenter un argument comme vrai pour la seule raison qu’il est endossé par une figure d’autorité ou prétendument d’autorité. Tenir compte du témoignage d’un spécialiste est normal et souhaitable. On se retrouve dans le domaine du sophisme quand : 1) la figure d’autorité n’a aucune expérience dans le domaine en question; 2) les avis divergents d’autres autorités dans le domaine sont passés sous silence ; 3) on accorde au témoignage de la figure d’autorité un poids disproportionné comparé aux autres facteurs. 


Exemple : « Mangez des céréales Wheaties pour être comme moi », déclare Michael Jordan. (Michael Jordan est très bien placé pour donner des conseils sur le basket-ball, mais son expertise en nutrition reste à prouver) 


Argument de la « pente glissante »

Ce type de sophisme consiste à tenter de détourner l’attention de la question en jeu en prétendant qu’une certaine décision dans ce domaine mettra en marche une série de conséquences de plus en plus graves, qui sont présentées comme liées au problème alors qu’elles dépendant en réalité d’une multitude d’événements qui auront lieu ou non dans le futur. 

Exemple : En bannissant les propos d’une grande violence ou obscénité, nous ouvrons la porte à un flot de censure qui ne s’arrêtera plus. D’abord la pornographie violente, mais après Penthouse et Playboy, puis James Joyce, D.H. Lawrence, Chaucer, Byron et Shakespeare. D’ici peu, nous vivrons dans un état fasciste où plus personne n’aura aucun droit. 


  • Sophismes réducteurs
Faux dilemme


Il consiste à proposer seulement deux choix à une situation donnée alors qu’il existe d’autres possibilités. Il convient de séparer les vrais des faux dilemmes. Ainsi, il existe des cas où seules deux positions sont possibles : toute créature dans le monde soit est un chien, soit n’en est pas un. Mais il serait faux de dire que toute créature dans le monde est soit un chien, soit un chat. Dans la plupart des situations, il existe divers moyens rendant inacceptable le fait de devoir choisir entre seulement deux options. 

Exemple : Le langage politiquement correct a pour but de combattre le racisme. Ou vous soutenez nos efforts pour bannir les propos haineux, ou vous êtes raciste. (Cette déclaration ne tient pas compte du fait qu’il y a d’autres moyens de combattre le racisme que le langage politiquement correct. Et que l’indifférence ne se confond pas avec le racisme. ) 

  • Sophismes qui font appel aux émotions
Appel à la tradition


Il s’appuie sur l’idée qu’une façon de faire est « bonne » parce que conforme à la tradition, confortable et acceptée depuis toujours. Les appels à la tradition et au respect du statu quo n’ont rien de logique, mais ont souvent beaucoup d’impact parce que vieilles idées et vieilles habitudes, même si elles ne sont pas parfaites, n’ont du moins rien de menaçant. 

Exemple : Autoriser la présence de femmes au Club serait un désastre ; ce dernier est réservé aux hommes depuis 135 ans ! Pourquoi briser maintenant la tradition ? 

Appel à la peur

Ce sophisme s’appuie sur l’idée que si on adopte ou non certaines décisions, les pires conséquences sont à craindre. 


Exemple : Si nous ne réformons pas les lois sur l’immigration, nous aurons bientôt épuisé les ressources futures de nos enfants au profit d’étrangers entrés illégalement au pays.


Argument de la popularité


Cela consiste à prétendre que vous devriez croire ou faire quelque chose parce que beaucoup de gens le pensent ou le font. Pour beaucoup d’entre nous, il est rassurant de faire comme tout le monde. 


Exemple : Ne soyez pas la dernière personne à acheter une ClipperMeister – la seule tondeuse au monde qui garantit à vos voisins que vous vous préoccupez autant qu’eux de l’embellissement du quartier. 



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Adaptation autorisée de Logical Fallacies, par Dr Michael Austin, professeur d’anglais à la Shepherd University, Shepherdstown, Virginie occidentale.

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